Si j’avais à enseigner à un groupe de jeunes en quoi consiste l’esprit sportif, je pense que j’escamoterais tout de suite la partie théorique du cours et que j’inviterais Mathieu Darche à venir leur expliquer comment il perçoit son métier de hockeyeur. |
Partout où il est passé, Darche a laissé le souvenir d’un excellent coéquipier et d’un maudit bon gars. Ce qu’il est d’ailleurs. Peut-être même trop.
Samedi soir, alors que le Canadien affrontait ses rivaux de toujours, les Bruins de Boston, j’étais assis sur la passerelle de presse avec un autre maudit bon gars: Ian Laperrière, des Flyers de Philadelphie.
(J’ouvre ici une parenthèse pour souligner, en passant, que Ian va beaucoup mieux depuis la terrible contusion au cerveau qu’il a subie durant les séries éliminatoires de la saison dernière, en bloquant un tir avec son visage [!]. Les violents maux de tête qu’il ressentait constamment à la suite de cette sérieuse commotion cérébrale ont disparu et il a recommencé à s’entraîner sur une base quotidienne.
«Il semble toutefois que mon nerf optique ait été touché du côté droit et une petite partie de ma vision avec cet œil est floue, surtout lorsque l’action se déroule rapidement autour de moi», a-t-il confié.
Lappy a donc décidé de laisser le temps passer un peu pour voir s’il serait possible pour lui de retrouver tous ses moyens et, qui sait? de revenir au jeu la saison prochaine. En attendant, pour lui éviter de devenir fou en tournant en rond à la maison, les Flyers lui confient des missions de recrutement [professionnel et amateur] et lui permettent de découvrir et d’apprécier les facettes de ce qui pourrait devenir sa deuxième carrière.
Peu importe ce qu’il adviendra côté santé, il semble que Laperrière restera dans le giron des Flyers quand il raccrochera ses patins. Il y a quelques mois, un ami me racontait que le propriétaire des Flyers, Ed Snider, avait déclaré que Laperrière était le joueur le plus «tough» à avoir jamais porté l’uniforme de son équipe! Ce qui n’est pas un mince compliment.
«Si j’avais eu la chance de connaître Laperrière il y a 10 ans, j’aurais remué mers et monde pour que nous puissions l’acquérir dans une transaction», aurait déclaré Snider. Fin de la parenthèse.)
Poli et... humble
Laperrière et moi regardions donc le match Canadien-Bruins quand, à la fin d’une période, Mathieu Darche a servi une mise en échec au dur à cuire Shawn Thornton au même moment où la sirène se faisait entendre.
Darche s’est aussitôt excusé auprès de Thornton, lui expliquant que son geste était accidentel.
«Sacré Darchie!» s’est exclamé Laperrière, qui aurait sans doute profité de cette «occasion» d’une manière bien différente.
Un peu plus tard en troisième, Darche a inscrit ce qui aurait été un but extrêmement important pour le Canadien. Mais les officiels de la LNH postés au centre de visionnement de Toronto ont jugé (avec raison) qu’il avait touché la rondelle à une hauteur supérieure à la barre horizontale.
Durant la pause publicitaire de trois minutes qui a suivi cette décision, Darche est allé calmement discuter avec les officiels afin d’obtenir des explications. Puis, avant la mise a jeu, il a même échangé quelques mots à propos de ce but refusé, de façon très courtoise, avec Tim Thomas.
Un bon gars, qu’on vous dit. Peut-être même trop, parfois.
En fin de troisième, alors que le Canadien jouissait d’une supériorité numérique inespérée, Scott Gomez a été crédité du but qui a relancé le Canadien et qui a changé le momentum de la rencontre. Toutefois, visionnez la reprise et vous constaterez que le tir de Gomez se dirigeait à côté du filet et que c’est Darche qui l’a fait dévier. La rondelle a ensuite heurté Chara avant de bondir par-dessus le bâton de Thomas.
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| Presque trop bien élevé ce Mathieu Darche! Photo d'archives Catherine Lefebvre |
Le gardien des Bruins a lui-même confirmé que la rondelle avait été redirigée par Darche et que tous ses changements de trajectoire l’avaient rendu incapable de lire correctement le jeu.
«Le tir de Gomez allait rater le filet, puis un autre joueur du Canadien (Darche) l’a fait dévier. La rondelle allait encore rater le filet, mais elle a heurté le patin de Chara…», a-t-il raconté après le match.
— Hé! Mathieu, n’est-ce pas toi qui as marqué ce but?
«Bof, ce n’est pas vraiment important, a répondu Darche avec un timide sourire. J’imagine que les gars qui s’occupent de la vidéo sont les mieux placés pour en décider.»
Un vrai bon gars, qu’on vous dit.
Mais on parle ici de la LNH. De sport professionnel. Tout le monde a trimé dur pour y parvenir (Darche pas mal plus que d’autres) et à la fin de l’année, chacun négocie son contrat en fonction de ses statistiques personnelles et de sa contribution à l’équipe. C’est comme ça que ça fonctionne.
Si j’étais Gomez, je demanderais donc à la ligue de créditer ce but à son véritable auteur: Mathieu Darche, qui a encore figuré parmi les meilleurs attaquants de son équipe samedi soir.
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