mardi 24 mai 2011

La présidence de Pierre Boivin

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Yvon Pedneault

Que demande-t-on habituellement à un chef d’entreprise quand on lui donne le gouvernail? S’assurer que la colonne des revenus augmente et qu’en bout de ligne, les profits viennent justifier l’investissement des actionnaires.
 
Pierre Boivin a quitté la Centre Bell la tête haute. Et il avait toutes les raisons de dire mission en grande partie accomplie. Sur le plan des affaires, il a rempli son mandat. Son curriculum vitae est encore plus impressionnant qu’à son arrivée au Centre Bell et c’est la raison pour laquelle il est maintenant à la tête de Claridge, une société qui se spécialise dans les investissements.
Stephen Bronfman a fait un choix éclairé. Il a opté pour un homme qui ne craint pas de prendre des décisions. Il a opté pour un homme bien servi par son flair et surtout par son don de l’analyse.
 
En fermant la porte de son bureau, Pierre Boivin laisse derrière lui un bel héritage. J’imagine que George Gillett l’a bien récompensé, parce qu’il lui a permis de réaliser un coup fumant relativement à la vente de l’équipe. À ses débuts au Centre Bell, l’organisation végétait. Elle venait de compléter une saison de 32-39-11. Pour les Canadiens, c’était un terrible constat d’échec et on ne voyait pas comment on pourrait redresser la situation.
George Gillett a mis toute sa confiance en Pierre Boivin, une décision qu’il n’a jamais regrettée.
 
L’homme d’affaires a rebâti l’organisation.
 
Sur le plan de la mise en marché, rares sont les organisations sportives qui peuvent se vanter d’avoir accompli ce que les Canadiens ont réussi au cours des dernières années. Dans les moments les plus difficiles, les gens du marketing parvenaient toujours à masquer le rendement de l’équipe avec des promotions spectaculaires.
 
Plus populaire que jamais
 
Dans son rôle de président, les bilans de l’entreprise ont toujours respecté les objectifs de la famille Gillett et plus.
 
Au fil de son mandat, le hockey des Canadiens a connu un engouement jamais vu au préalable. Le Centre Bell est rempli à chaque match, les revenus augmentent à tous les ans, la liste d’attente pour des abonnements saisonniers est impressionnante. Les droits de télédiffusion des matchs ont atteint des niveaux inimaginables. Il a créé la Fondation des Canadiens pour l’enfance, un organisme qui, année après année, vient en aide aux démunis. En conclusion, il laisse une entreprise en très bonne santé financière.
 
Il remet tous les dossiers aux propriétaires, les frères Molson. Il était clair qu’on en viendrait là à partir du moment où Geoff Molson a décidé qu’il serait le gestionnaire de l’entreprise, que son bureau serait au Centre Bell et qu’il verrait aux opérations quotidiennes de l’entreprise achetée à un coût dépassant toutes les prévisions.
 
Donc, il ne pouvait y avoir deux coqs dans la même basse-cour.
 
La tâche entreprise par Geoff Molson, il y a un an, est d’assurer une continuité sur le plan financier et de fournir aux hommes de hockey toutes les conditions pour ramener les Canadiens parmi les équipes les plus en vue de la Ligue nationale. Pour ramener les Canadiens parmi les formations les plus influentes du circuit.
 
Sous le régime de Pierre Boivin, il faut bien le reconnaître : sur le plan hockey, ça n’a pas été une réussite.
 
Quatre directeurs généraux, six entraîneurs, un constat d’instabilité. Réjean Houle, André Savard, Bob Gainey et Pierre Gauthier ont occupé un poste que, depuis le départ de Serge Savard, personne n’a réussi à combler avec succès.
Alain Vigneault, Michel Therrien, Claude Julien, Bob Gainey deux fois, Guy Carbonneau et Jacques Martin ont défilé derrière le banc. Curieusement, Julien et Vigneault sont impliqués dans les finales d’association.
 
Sous la direction de Pierre Boivin, les joueurs francophones ont disparu. On peut toujours jeter le blâme sur les recruteurs et Trevor Timmins pour cette situation plutôt embarrassante, surtout quand l’organisation évolue dans un marché francophone, mais c’était quand même Pierre Boivin le patron.
 
Le passage de Bob Gainey n’a pas été aussi concluant que le président sortant veuille bien le laisser croire. Quand il mentionne que le grand ménage de 2009 a été l’événement le plus marquant, justement, on aurait pu éviter ce grand ménage si les penseurs du secteur hockey avaient fait preuve d’un bon jugement dans l’évaluation des athlètes.
 
En 2009, on a changé l’image de l’équipe et il a fallu sortir les millions de dollars avec le résultat qu’aujourd’hui, Pierre Gauthier doit composer avec une masse salariale difficile à gérer… surtout avec un joueur comme Scott Gomez et plusieurs joueurs dans la trentaine.
 
Dans les faits, Pierre Boivin a quitté les Canadiens avec la satisfaction du devoir accompli. L’entreprise qu’il a dirigée pendant 12 ans a permis à son propriétaire de réaliser des profits à tous les ans.
 
De gros profits.
 
Et, ensuite, le même propriétaire a vendu son équipe et son édifice pour une somme de près de 600 millions $.
 
Quand il a quitté le Centre Bell, mercredi, il n’avait pas à transporter une réplique de la coupe Stanley. Il avait un championnat d’association, rien de plus.
 
Les résultats de l’équipe au niveau de la surface de jeu ne se comparent aucunement au modèle d’affaires qu’il a créé et peaufiné pendant les 12 dernières années.
 
Mais, on dit souvent qu’un président est embauché pour réaliser des profits.
 
C’est ce qu’a fait Pierre Boivin et pas toujours dans des conditions idéales… surtout quand le propriétaire a besoin de liquidités. Ne reste plus qu’à lui souhaiter beaucoup de succès dans la nouvelle aventure qu’il entreprendra bientôt.

Connaissant sa détermination, il va sûrement atteindre les objectifs que lui a fixés Stephen Bronfman.