lundi 7 mars 2011

Toiture qui coule et appels d’offres…

http://ruefrontenac.com/mleclerc/34570-chronique-leclerc-gorges

La chronique de Martin Leclerc
Dimanche, 06 mars 2011 14:08

Je nous revois tous, au début janvier. Monté sur une petite boîte devant son casier pour que tous les journalistes et cameramen puissent le voir, Josh
Gorges expliquait qu’il allait devoir subir une intervention chirurgicale à un genou et que sa saison était terminée. Et il répétait à quel point cela était difficile pour lui.

À cette époque, Andrei Markov avait déjà été renvoyé à la clinique (pour les mêmes raisons que Gorges) après avoir disputé sept rencontres seulement. Et nous nous disions tous que le Canadien venait de perdre ses deux principaux piliers, ses deux éléments les plus stables, et qu’une participation aux séries éliminatoires devenait un objectif hautement hypothétique.

Avec le courageux et efficace Gorges dans l’alignement, le Canadien avait récolté 39 points en 36 rencontre (18-15-3). Depuis que la défense du Canadien a perdu cette « force stabilisatrice », l’équipe a récolté 37 points en 30 matchs (16-9-5) ! Elle accorde un but de plus à tous les deux ou trois matchs, mais elle amasse plus de points au classement.

Les habitués de cette chronique savent que je ne porte pas de pompons aux couleurs du CH pour la rédiger. Mais ce qui se passe à la ligne bleue de cette formation depuis le début de la saison est plutôt impressionnant. Pour ne pas dire intrigant.

Regarnir une brigade défensive dans la LNH est-il un exercice plus facile qu’on ne le croit ? Les véritables piliers du groupe de défenseurs du Canadien avaient-ils été mal identifiés ? Le groupe d’entraîneurs, Perry Pearn en tête, est-il en train de réaliser des miracles avec les moyens du bord ?

Quand Pierre Gauthier raconte qu’il s’est affairé à réparer un toit qui coulait cette année, on se rend compte que les sous-contractants ont été nombreux.
Pas moins de 13 défenseurs ont endossé l’uniforme depuis octobre dernier, et quatre seulement ont disputé environ 90 % des matchs de l’équipe : Roman Hamrlik, Jaroslav Spacek (blessé à un genou, ce dernier sera absent jusqu’aux séries éliminatoires), Hal Gill et P.K. Subban.

On parle de deux défenseurs de 37 ans, d’un défenseur de 36 ans qui est l’un des plus lents patineurs de la LNH et d’une recrue. Ce plan d’affaires n’aurait probablement pas convaincu grand monde avant le début de la saison.

Pour boucher les trous, Pierre Gauthier et Jacques Martin ont fait appel jusqu’ici à une recrue (Yannick Weber) et quatre vétérans (Alexandre Picard, James Wisniewski, Paul Mara et Brent Sopel) qui ont porté les couleurs de 21 formations de la LNH. Et cela ne fait qu’ajouter au mérite du curieux « Big Four » du CH.

Les saisons sont longues, et il ne serait pas surprenant que les « vieux » arrières de l’équipe manquent d’énergie quelque part en avril. Mais il faut avouer qu’ils ont été impressionnants jusqu’ici.

Même chose pour les entraîneurs. Le CH n’a pas été aussi handicapé par les blessures qu’il ne l’avait été au cours des deux saisons précédentes. Mais n’empêche. On parle d’une équipe défensive qui a vu des défenseurs importants tomber au combat. Et comme le lapin d’Energizer, elle marche encore !

Une bien drôle de loi

Dans un autre ordre d’idées, saviez-vous que la Ville de Lévis, dans la région de Québec, publie ces temps-ci un appel d’offres « pour l’entretien ménager de certains bâtiments municipaux » ?

Quel est le rapport avec le monde du sport ? Eh ! bien, cette semaine, à la suite de la conclusion d’une entente de partenariat entre la Ville de Québec et Quebecor pour la gestion et l’exploitation du futur amphithéâtre payé par les contribuables, quelques lecteurs m’ont adressé des questions fort pertinentes.

Par exemple, certains se demandaient comment le contrat de gestion d’un amphithéâtre qui coûtera 400 millions de dollars aux contribuables (on parle d’une entente de 25 ans comportant des frais de loyer et des engagements de plus de 100 millions de dollars) ait pu être conclu un samedi soir derrière des portes closes en échappant à tout processus d’appel d’offres.

Pourquoi la Loi sur les cités et les villes oblige-t-elle Lévis, Drummondville ou Sainte-Annne-des-Plaines à faire un appel d’offres quand elles veulent conclure une entente de 100 000 $ pour faire entretenir les patinoires extérieures de leurs parcs ou un contrat de 800 000 $ pour faire l’entretien ménager de leurs bibliothèques ? Et comment Québec peut-elle octroyer un contrat d’une telle importance sans que l’on puisse savoir quelles étaient les offres formulées par les autres grandes entreprises (le maire Labeaume a dit qu’elles étaient six ou sept) intéressées par ce contrat ?

J’ai fait quelques appels auprès de grands cabinets d’avocats. Voici ce qu’on nous dit :

« Pour ce qui est de l’entente avec Quebecor, il s’agit d’un contrat selon lequel Quebecor paie pour louer les lieux, les exploiter et acquérir les droits quant au nom des futures installations. Il s’agit donc d’un contrat en vertu duquel Quebecor paie la Ville. La Ville ne verse aucun montant à Quebecor.

Les dispositions de la Loi sur les cités et villes quant aux appels d’offres ne visent que les cas où les villes effectuent une dépense. Par exemple, acheter un camion ou construire un bâtiment. En revanche, une Ville peut vendre un terrain lui appartenant sans aller en appel d’offres. Elle peut louer à un tiers un local dans un immeuble appartenant à la Ville sans aller en appel d’offres (par exemple, louer la concession du resto de l’aréna municipal).
Évidemment, rien n’empêche une Ville de demander des soumissions même si elle n’a pas l'obligation légale de le faire. »
Sur 25 ans, cette entente avec Québec pourrait facilement permettre à
Quebecor d’engranger des revenus surpassant le milliard de dollars. Et rien dans la loi québécoise ne permet de superviser l’octroi de tels contrats ! Ça fait penser aux droits d’exploitation du pétrole de l’île d’Anticosti, qui ont été cédés à une entreprise privée dans le plus grand secret. On parle quand même de 30 à 70 milliards de barils de pétrole…

Rien, donc, n’oblige la Ville de Québec à faire preuve de transparence. Mais dormons en paix, les petits entrepreneurs qui arrosent les patinoires extérieures, eux, sont étroitement surveillés.