jeudi 10 mars 2011

Chara mérite 10 matchs… selon moi

http://blogues.cyberpresse.ca/gagnon/2011/03/09/chara-merite-10-matchs%E2%80%A6-selon-moi/

Pendant que Max Pacioretty roulait en ambulance en direction de l’hôpital Général où il a passé la nuit, j’ai réclamé une suspension de 10 matchs à l’endroit de Zdeno Chara pour son geste à l’endroit du jeune attaquant du Canadien.

J’étais à l’entrée du vestiaire du Canadien lorsque Pacioretty a quitté étendu sur une civière. J’y étais pour accorder une entrevue à TSN. Une entrevue qui n’avait rien à voir avec le coup, mais qui n’a finalement porté que sur le coup…

Les images saisissantes pour ne pas dire terrifiantes de l’Américain étendu sur la patinoire me donnaient encore des hauts le cœur.
Et le silence, ce silence lourd qui étouffait le Centre Bell pendant qu’on s’affairait autour de Pacioretty sur la patinoire, rendait la situation plus grave encore.

On sentait la gravité de la situation dans le silence des joueurs qui marchaient lentement vers leur vestiaire. On la lisait dans les yeux du directeur général Pierre Gauthier et d’autres membres de l’état-mjor lorsqu’ils sont arrivés en trombe pour prendre des nouvelles du jeune homme.

Comme moi, comme les parents de Pacioretty qui étaient au Centre Bell hier, comme les 21 271 autres partisans des deux équipes, les centaines de milliers devant leurs téléviseurs, les membres de l’état-major craignaient le pire.
Pendant une seconde, ou deux, ou trois, j’ai cru qu’il ne se relèverait jamais.

Pendant une seconde, ou deux, ou trois, j’ai revu Trent McLeary, atteint à la gorge par un tir frappé de Chris Therrien alors avec les Flyers de Philadelphie.
J’ai revu ce bon copain connu à l’époque des très jeunes et très mauvais Sénateurs d’Ottawa qui doit la vie à l’intervention de David Mulder, le médecin du Canadien, et à la Trachéotomie pratiquée presque de façon militaire à sa sortie de la patinoire.

Pendant une seconde, ou deux, ou trois, j’ai revu les images du lugeur Géorgien, Nodar Kumaritashvili, images qui ont assombri les Jeux olympiques de Vancouver et je me suis dit que Paciorrety était peut-être mort lui aussi.

Depuis le temps qu’on dit qu’un joueur de hockey ne se relèvera pas un jour, je croyais vraiment que le jour était arrivé et qu’on nous annoncerait que Pacioretty s’était cassé le cou en frappant la cloison séparant les bancs des Bruins et du Canadien au centre de la patinoire.

Le pire a encore été évité

Les nouvelles que Pacioretty était conscient, capable de parler et de comprendre les réponses qu’on lui offrait, capable de bouger ses bras, ses jambes ont minimisé les conséquences du geste de Chara.
Mais peuvent-elles minimiser le fait qu’il mérite une suspension? Une suspension sévère à mes yeux.

Ma réponse est non.

Mais au milieu des centaines de messages implorants des suspensions de 10, 20 et 100 matchs, des appels à l’intervention de la Justice, des appels au calme se sont mis à déferler.

Je passe sous silence ici, volontairement, les messages haineux des partisans des Bruins et des apôtres de la violence qui soutiennent que le grand capitaine ne méritait rien de plus qu’une pénalité mineure et que jamais au grand jamais il aurait dû être chassé du match. Encore moins une suspension.

Ces personnes ne connaissent rien des règlements.

Les arbitres, dans une situation comme celle de mardi, peuvent imposer une expulsion du match dès qu’ils considèrent que le geste initial représentait une intention de blesser et/ou qu’il y a effectivement eu blessure.
Rappelez-vous le match du 23 décembre dernier en Caroline lorsque Jaroslav Spacek s’est fait planter tête première dans la bande par Erik Cole. Les arbitres auraient pu être plus sévères sur cette mise en échec par derrière, mais ils ont décidé d’afficher une clémence certaine en raison des antécédents de Cole qui s’est fait casser le cou, au sens propre, il y a six ans par Brooks Orpik des Penguins de Pittsburgh.

Aucune clémence

Dans le cas de Chara, aucune clémence ne tient la route.

Vrai que la situation géographique de l’incident a eu à voir avec les conséquences. Et c’est justement un facteur aggravant. Chara savait très bien où il était sur la glace. Il savait très bien que l’endroit était dangereux.

L’endroit le plus dangereux de la patinoire.
Et qu’est-ce qu’il a fait?

Il a donné une petite poussée supplémentaire à Pacioretty qui s’est retrouvé tête première derrière une baie vitrée qui n’a pas même bougé pour absorber une partie de l’impact.

Voyez par vous même si vous ne l’avez pas déjà fait 100 fois plutôt qu’une…

Personne ne peut lire dans les pensées de Chara. Personne ne peut dire qu’il voulait ou non blesser Pacioretty.

Mais à 4-0 Montréal, avec les antécédents entre le Canadien et les Bruins, entre Chara et Pacioretty, il y a là matière à soupçons.

Que des anciens joueurs soutiennent que Chara ne mérite rien de plus qu’il a déjà reçu, je peux vivre avec.

Que des anciens coachs partagent leur avis me fait sourire. Car si c’était arrivé à l’un de leurs joueurs à l’époque qu’ils étaient entraineurs, ils auraient réclamé une forte suspension.

Mais quand un collègue que je respecte comme Bob McKenzie de TSN invite à un peu de retenue et surtout à laisser tomber l’émotivité avant de réclamer un peloton d’exécution pour Chara, j’écoute.

J’écoute et je réfléchis.

Ce que j’ai fait au cours de la nuit.

Mais ce matin, je refuse de changer d’idée. J’accepte tous les facteurs disculpatoires avancés en faveur de Chara.

En fait pas tous. Chara est un joueur salaud. Plus grand, plus gros, plus fort joueur de la LNH quand il perd la tête, il est capable du pire sur la glace. On l’a déjà vu.

Mais quand je revois les images, que je pense aux parents de Pacioretty qui ont du arrêter de vivre pendant les sept minutes que leur fils a passées dans le néant avant de passer la nuit à l’hôpital, quand je pense à l’image noircie du hockey qui fait encore de tour de la planète ce matin, je me dis que la LNH doit sévir.

Qu’elle n’a pas le choix.

En fait oui. Elle a le choix. Mais espérons que cette fois elle prendra la bonne décision.

La Ligue ne lui imposera pas ce que je voudrais qu’elle lui impose. Chara encaissera peut-être deux, voire cinq matchs de suspension. Peut-être sera-t-il blanchi comme certains le prétendent.

Ce qui serait une tragédie pour le hockey.

Mais je ne m’attends pas à ce que mon souhait de 10 matchs de suspension soit exaucé.