vendredi 11 mars 2011

Civiliser le hockey

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(Québec) La violente mise en échec infligée au hockeyeur Max Pacioretty lors du match du Canadien, mardi, à Montréal, ne laisse personne indifférent. Des partisans du Tricolore aux parlementaires, en passant par les analystes et chroniqueurs sportifs, ils sont nombreux à condamner le geste de Zdeno Chara et à remettre en question la décision de la Ligue nationale de hockey (LNH) de n'imposer aucune suspension ni amende au géant des Bruins.

Même Air Canada, l'un des principaux soutiens corporatifs de la LNH, menace de retirer ses billes si le circuit ne prend pas des actions immédiates et sérieuses concernant les coups à la tête.

Même le directeur des poursuites criminelles et pénales du Québec (DPCP), Me Louis Dionne, a réclamé la tenue d'une enquête policière sur cet épisode de hockey peu glorieux. Même le premier ministre du Canada, Stephen Harper, a fait part de son inquiétude au sujet de l'augmentation des blessures graves dans la LNH.

Le message envoyé à la ligue doit être clair : les coups vicieux comme celui qu'a servi Chara à Pacioretty doivent être proscrits et sévèrement punis. Le hockey a beau être un sport de contact, il y a des limites à s'en prendre à l'intégrité physique de ses adversaires.

Ce que la direction de la ligue doit mettre une fois pour toutes dans sa pipe, c'est que si elle est incapable de mettre fin elle-même aux pratiques disgracieuses sur la glace, le politique le fera à sa place. Que si elle s'entête à légitimer les excès de violence, le système de justice se chargera tôt ou tard de la rappeler à l'ordre.

Dans cette optique, l'intervention du DPCP est une riche initiative. Bien qu'il sera difficile de faire la preuve de l'intention criminelle de Zdeno Chara - il n'est même pas sûr qu'un procureur aura suffisamment d'éléments pour déposer des accusations contre lui au terme de l'enquête policière - le DPCP aura au moins rappelé à la LNH que tout n'est pas permis sur la patinoire. Que le geste commis par Chara dépasse le cadre du hockey. Que même si la ligue a ses propres règles, elle n'en demeure pas moins soumise à celles qui s'appliquent à l'ensemble de la société.

Selon un sondage CROP-La Presse réalisé mercredi, pas moins de 78 % des
Québécois estiment que le sport national est devenu trop violent. Non seulement les résultats du sondage n'auraient certainement pas été les mêmes si celui-ci avait été réalisé il y a deux semaines, mais les Québécois ne se seraient assurément pas montrés aussi outrés par la sauvage mise en échec de mardi si elle avait été administrée par un joueur du Canadien.

Mais ne nous égarons pas. Qui que nous soyons et au-delà de la partisannerie, que la tronche de Zdeno Chara nous revienne ou pas, il faut dénoncer vigoureusement et publiquement la recrudescence de gestes qui relèvent davantage de l'agression pure et simple que de la violence intrinsèque au hockey professionnel.

Évidemment, il faudra plus que la colère des Québécois pour convaincre la LNH de sévir davantage contre les coups vicieux. Le ras-le-bol doit être généralisé, accompagné de menaces à la Air Canada et du spectre de poursuites criminelles ou civiles. Peut-être alors les dirigeants de la LNH et les propriétaires d'équipes finiront-ils par comprendre que le développement et l'expansion du hockey professionnel ne peut pas passer par le désolant spectacle d'une commotion cérébrale.